mardi 13 février 2007

Etat des lieux - suite

Mardi 5 Décembre 2006
J+42

Après avoir patienté depuis plusieurs semaines, je n’attendais plus aucun signe d’intérêt. J’attendais qu’il agisse et se faisant, je n’osais pas moi-même agir d’aucune façon que ce soit. J’étais prostrée. Alors, mon attention a été détournée et voilà que je me mets à fantasmer sur un autre homme de mon entourage, tout aussi distant, Martin l'étranger. Qu’attendre de lui, le barman tellement mystérieux. Là, j’ose, et j’agis. En tout cas, je me place dans son champ de vision, je me fais présente. Et j’échafaude des plans pour l’approcher. J’y suis presque maintenant. Et je me détache de mon obsession première pour une nouvelle, moins douloureuse.
Et c’est à ce moment que la communication reprend avec Johannes. Il vient vers moi et m’interroge : qu’est-ce qui est décidé? Je ne pensais pas que cette entête fonctionnerait. J’en ai testé des tas, aucune ne semblant l’intéresser. Alors oui, j’ai décidé de passer mon réveillon à Paris avec Tanneke. Il s’excuse de ne pas appeler ces derniers temps, essaie de me montrer qu’il a été distrait et qu’il doit rappeler pas mal de monde. Bref, il va organiser ce fichu réveillon et ce serait bien si je pouvais venir, Tanneke aussi bien sûre. Alors, oui, peut être, on a encore rien prévu après tout.


Aujourd’hui, mardi, j’ai encore pensé à Martin, je me suis dit qu’hier je n’avais pas été assez forte et audacieuse et que j’étais « passée à côté ». Alors une fois encore, je pense à lui. Et je me décide à sortir de ma bulle, et à me confronter à l’extérieur. Je vais à la librairie et tombe entre mes mains « douleur exquise ». La beauté du livre, sa forme, sa rugosité, tout ça prend place dans ma main comme une réponse, une évidence. Je le feuillettes. Il me le faut. Et tout de suite, j’avale ce contenu comme un médicament pour soigner ma propre douleur.
Je rentre. Je prépare un thé. Le téléphone vibre. Et là, je pense calmement « c’est Johannes ». Pas d’émotion, pas de cri de surprise, je sais que c’est lui c’est tout. Je prend mon téléphone, j’ai raté la communication, alors je le rappelle immédiatement. Je suis sereine. Après tout, c’est lui qui a quelque chose à me dire. Il parle de l’organisation du réveillon. Que L. doit venir, avec Y., et K. Tu le connais? Oui je l’ai rencontré. On fait ça chez J. Ça serait bien si tu pouvais venir, Tanneke aussi évidement. Oui pourquoi pas. D’accord, je lui en parle. Pour la réservation, je te tiens au courant avant la fin de la semaine.
La chose est donc décidée.
Maintenant, il me reste à me préparer à l’idée de le voir peut être, même sans doute, avec quelque un. Je ne pense pas qu’il viendra seul, et en même temps, je ne souhaite que ça! Il faut que je sois assez forte pour affronter la présence de cette fille à ces côtés, et que je supporte le fait qu’il ne sera pas à mes côtés. Que je pense aux autres qui seront là aussi ce soir. L., je sais qu’il sera une fois de plus ma béquille. Je suis malgré tout ça sereine. Et je sais que beaucoup de choses vont se décider à l’occasion de ce voyage. J’ai l’impression de vivre une histoire assez proche de Sophie Calle, entourée par les mêmes dates : 24 octobre, la séparation. La seconde date est le 25 janvier. Que ce passera-t-il ce 25 janvier 2007?

Quels sont aujourd’hui mes sentiments face à cette histoire longtemps rêvée et prenant aujourd’hui forme dans la réalité? Je suis amoureuse de lui, de son image, de sa peau et de sa voix. Je rêve de lui depuis mon adolescence, et cette relation fantasmée a brûlé ma vie par les deux bouts. J’ai plongé droit dans ma douleur, je l’ai provoqué, je l’ai longuement répétée, mise en scène. Et aujourd’hui quelle en sera l’aboutissement? J’ai peur de ne finalement pas avoir envie d’aller plus loin. J’ai peur d’avoir tellement imaginé nos dialogues, nos retrouvailles ou nos disputes, que finalement j’ai consumé entièrement cet amour avant même qu’il ne commence. Qu’est-ce que j’attend encore de lui?
Je pense être à peu près sûr d’une chose. Je ne vais pas lui courir après jusqu’au réveillon. Je vais me limiter à lui donner en temps et en heure les informations nécessaires. Horaire d’arrivée, réservation confirmée. Je dois provoquer de nouveau un manque et ainsi un intérêt croissant pour nos retrouvailles, comme cela s’est produit cet été.
Quand je repense à cet été, je ne vois qu’une chose, sa démarche chaotique sur le sable dans la nuit, sa guitare sur le dos, et son silence. Son visage qui s’éclaire, sa détermination, il avance sur moi. À cet instant, malgré la douzaine de personnes présentes autour du feu de camp, nous ne sommes plus que deux.

Mercredi 27 Décembre 2006

Me voilà. Développons un peu le sujet. Je suis « sous influence ».
J’ai bien apprécié mon travail ces dernières semaines, et je suis contente que cela évolue dans ce sens. Je sais que j’aime ça, j’en suis capable, j’ai encore beaucoup à apprendre, mais je me sens motivée de nouveau.
Et heureusement qu’il y a le travail pour m’empêcher de penser toute la journée à « mon cher et tendre » parce que sinon, ma vie deviendrait un enfer! Je suis totalement accro, obsédée, et je ne tends que vers cet objectif : le revoir. Et plus approche le jour J et l’heure H, et plus je suis tendue, « «électrique »! Et oui, j’ai beau faire beaucoup d’effort pour me préparer à l’idée que lui ne m’attend pas, qu’il sera accompagné et que je ne dois pas me laisser aspirer par un grand vide intérieur en le voyant en bonne compagnie, ça ne marche pas! Je sais tous ça, la sensation que cela laisse et j’imagine le masque qui couvrira mes yeux quand je les verrais ensemble la première fois. Mon cœur va se froisser dans ma poitrine, mes lèvres vont se contracter, et ma poitrine va être comme aspirée à l’intérieur de moi-même, vers un grand vide, un vide abyssal.
Je sens déjà légèrement cette douleur, c’est très ténu. Pour l’instant, j’aime la provoquer en y pensant, parce que la douleur est aussi très jouissive, c’est sentir que l’on est vivant. Mais en même temps, il m’est très facile de la stopper en pensant à une chose très douce. Je me dis, mais non, il sera avec moi et JE serai dans ces bras! Et hop, la douleur se transforme en souffle grandissant de satisfaction et mon cœur se soulève comme dans les manèges! Ou sur une balançoire.
Pourquoi est-ce que je n’arrive pas à être vraiment touchée par cette idée? Je sais qu’il sort avec cette demoiselle et qu’il tient certainement à elle, mais véritablement, je n’arrive pas à être inquiète par cette idée. Peut être parce que moi aussi pendant six ans, j’ai partagé ma vie avec un autre et que malgré tout, aujourd’hui, c’est encore et toujours lui qui compte dans ma vie.(...) Comme si j’avais une légitimité, je suis celle qui compte pour le cœur et l’âme, celle que l’on respecte et qui sera toujours là.
Voilà pourquoi je n’arrive pas à imaginer le pire.

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